La DREES publie deux nouvelles études sur les professionnels de santé. La première décrit la démographie des médecins en 2018 et l'accessibilité géographique aux médecins généralistes. La seconde présente les résultats issus du modèle permettant de projeter le nombre d'infirmiers en activité à l'horizon 2040. En outre, la DREES met en ligne un nouvel outil permettant à tous d'accéder aux projections d'effectifs de médecins en choisissant un jeu d'hypothèses de projection parmi 30 combinaisons possibles.
La DREES réalise chaque année de nombreuses études sur les professionnels de santé afin de décrire leur formation, leur répartition géographique, ainsi que leur activité, leur carrière, leurs conditions d'exercice et leurs revenus. Pour cela, elle rassemble, confronte et analyse les sources disponibles, qu'il s'agisse de fichiers administratifs (Déclarations annuelles de données sociales - DADS), de répertoires spécialisés (Répertoire Partagé des Professionnels de santé - RPPS -, Automatisation DEs LIstes - Adeli) ou d'enquêtes qu'elle réalise (enquête auprès des établissements de formation aux professions de santé, panel de médecins généralistes, enquête sur les délais d'attente) ou que le système statistique public produit sur son champ d'observation (enquête sur les Risques psycho-sociaux, enquête Génération).
En France, au 1er janvier 2018, on compte 226 000 médecins en activité, soit 1 500 de plus qu’en 2017 (+0,7 %) et 10 000 de plus qu’en 2012. Depuis six ans1, l’effectif de médecins a ainsi progressé de 4,5 %, les effectifs de médecins hospitaliers et de spécialistes (hors généralistes) étant particulièrement dynamique. Le nombre de médecins généralistes, en revanche, stagne. La démographie des médecins au 1er janvier 2018 est présentée dans la publication « 10 000 médecins de plus depuis 2012 » (Anguis M. et al, Etudes et Résultats, DREES, n°1061).
La DREES comptabilise les médecins « actifs », c’est-à-dire ayant déclaré au moins une activité en France au Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM). Ce concept inclut les médecins remplaçants, ainsi que ceux qui cumulent emploi et retraite ; il exclut les médecins temporairement sans activité. Il diffère légèrement des concepts définis par le CNOM, d’activité « régulière » (médecins actifs, hors remplaçants et médecins cumulant emploi et retraite) ou « totale » (tous médecins y compris médecins remplaçants et médecins temporairement sans activité, hors médecins cumulant emploi et retraite). Ainsi, selon le CNOM le nombre de généralistes a baissé ces dernières années parce que seuls les médecins « en activité régulière » sont considérés. Contrairement aux chiffrages ici présentés, les médecins qui cumulent emploi et retraite et les remplaçants, dont le nombre a fortement progressé ces dernières années, sont exclus des calculs du CNOM.
Parmi les 226 000 médecins en activité en France, 102 000 sont des généralistes (45 % de l’ensemble) et 124 000 sont des spécialistes hors médecine générale (55 % de l’ensemble). Les spécialités qui regroupent les effectifs les plus importants sont la psychiatrie (6,8 % des médecins), l’anesthésie-réanimation (5,1 %), le radiodiagnostic et l’imagerie médicale (3,9 %).
57 % des médecins sont des libéraux. 46 % ont une activité libérale exclusive et 12 % un exercice « mixte » (cumul d’une activité salariée et d’une activité libérale).
Depuis 2012, le nombre total de médecins a progressé de 4,5 %. Au cours de cette période, le nombre de médecins généralistes a stagné (+0,7 %), tandis que le nombre de spécialistes a progressé de 7,8 %. Parallèlement, le nombre de libéraux n’a pas évolué (+0,04 %), la baisse du nombre de généralistes exerçant en libéral (-2,0 %) a compensé la hausse du nombre de spécialistes libéraux (+2,4 %). Le nombre de salariés et particulièrement de spécialistes salariés a lui fortement augmenté (respectivement +11,1 % et +13,9 %). L’augmentation du nombre de spécialistes et de salariés explique ainsi la hausse des effectifs de médecins au cours des six dernières années.
47 % des médecins ont 55 ans ou plus (alors que c’est le cas de 18 % des cadres et professions intellectuelles supérieures) et 30 % ont 60 ans ou plus. L’âge moyen des médecins (51 ans) est élevé car les générations actuellement proches de la retraite sont issues des numerus clausus élevés des années 1970 (proches des niveaux actuels, autour de 8 000), tandis que les générations suivantes ont connu des numerus clausus plus bas (inférieurs à 4 000 dans les années 1990).
1 C’est l’évolution depuis 6 ans qui est considérée du fait d’une rupture de série en 2012, date à partir de laquelle les médecins sont recensés à travers le Répertoire Partagé des Professionnels de Santé (RPPS).
Les femmes représentent 46 % des médecins. Elles sont majoritaires parmi les médecins de moins de 60 ans (52 %). Moins représentées parmi les libéraux (38 %), elles sont tout de même les plus nombreuses parmi ceux de moins de 50 ans.
Parmi les 8 600 nouveaux médecins inscrits au Conseil national de l’Ordre national des médecins (Cnom) au cours de l’année 2017, 59 % sont des femmes, soit une part bien supérieure à celle qu’elles représentent parmi les médecins en activité (46 %). Cette proportion importante de jeunes médecins femmes observée depuis plusieurs années est à l’origine de la féminisation de la profession au fil du renouvellement des générations.
15 % de ces nouveaux inscrits sont des médecins à diplôme étranger. Parmi ces nouveaux arrivants, près des deux tiers sont des spécialistes salariés.
63 % des nouveaux médecins sont salariés, soit une proportion nettement plus élevée que parmi l’ensemble des médecins en exercice (43 %). Les jeunes médecins libéraux ou mixtes exercent pour les deux tiers d’entre eux en tant que remplaçants (à titre de comparaison, parmi les médecins installés, un médecin libéral ou mixte sur neuf est remplaçant).
La question de l’accès aux soins est omniprésente dans le débat public contemporain. La dimension spatiale, envisagée sous l’angle de la répartition territoriale des professionnels de santé, est une dimension structurante de l’accès : ainsi, c’est l’axe principal du plan pour l’égal accès aux soins dans les territoires lancé en octobre 2017 par le ministère.
Si la présence d’un professionnel de santé est une condition nécessaire mais non suffisante de l’accès aux soins, reste la question de savoir comment mesurer la présence. Les indicateurs les plus couramment utilisés sont les indicateurs de densité, qui rapportent une offre disponible sur un territoire à la population y résidant. Toutefois, ces indicateurs, très lisibles, présentent un biais important, lié à la taille de maille d’étude retenue : si la maille est trop grosse, l’indicateur de densité calculé va gommer toutes les disparités au sein d’un territoire et considérera comme également dotés l’ensemble des habitants de ce territoire. A contrario, travailler à un niveau trop fin équivaudra à considérer les frontières comme parfaitement étanches et à nier tout déplacement d’un territoire à l’autre. Raisonner avec un indicateur de temps d’accès au plus proche résout ce problème mais ne rend pas compte de la disponibilité de l’offre. Ainsi, il prendra la même valeur quel que soit le nombre de patients susceptibles de s’adresser à un professionnel.
Pour remédier à ces limites, la DREES et l’IRDES ont développé conjointement un indicateur d’accessibilité aux soins : l’APL (accessibilité potentielle localisée). Cet indicateur synthétique permet de tenir compte à la fois de la proximité et de la disponibilité des médecins d’une part et des besoins de soins de la population locale en fonction de l’âge d’autre part. Il est donc plus fin et plus opérant que les indicateurs traditionnels de densité médicale (car un médecin est considéré comme au moins partiellement accessible tant qu’il exerce à moins de 20 minutes de la résidence du patient, que ce soit, ou pas, sur le même territoire) ou de temps d’accès au professionnel le plus proche. Développé en 2012, il a été mobilisé depuis pour définir notamment le cadre national de la construction des zones sous-denses en médecins (arrêté du 13 novembre 2017 relatif à la méthodologie applicable à la profession de médecin pour la détermination des zones prévues au 1° de l'article
L’indicateur d’APL aux médecins généralistes se lit comme une densité et rapporte une offre de consultations disponibles à une demande de soins standardisée. Ce dernier point est particulièrement important car il permet de rendre comparable l’accessibilité de deux territoires ayant des populations d’âges très différents et donc des besoins de soins hétérogènes. Ainsi, dans une situation théorique de deux communes faisant face à la même offre de soins en médecine générale mais ayant des populations respectivement « jeunes » et « âgées », l’APL de la commune la plus jeune sera supérieure car les besoins de cette population sont moindres que ceux d’une population âgée.
En prenant en compte le seuil de 2,5 consultations par habitant et par an, près de 5,7 millions de personnes résident en 2016 dans une commune sous-dense en médecins généralistes. 9 142 communes sont en situation de sous-densité. Ce sont le plus souvent des communes rurales périphériques des grands pôles ou des communes hors influence des pôles. Toutefois, des espaces urbains sont également touchés : un quart de la population habitant dans une commune sous-dense en médecins généralistes vit dans un pôle urbain, dont près de 18 % dans l’unité urbaine de Paris.
Les personnes âgées de 70 ans ou plus ont 2,3 fois plus recours aux médecins généralistes que les patients les plus jeunes. S’ils avaient des difficultés d’accès géographique aux généralistes, le problème serait donc plus aigu que pour d’autres catégories de population. L’indicateur d’APL montre que ce n’est pas le cas, ils accèdent aussi bien aux généralistes que le reste de la population. Ils représentent en effet 13,3 % des habitants des communes sous-denses, soit un peu moins que leur poids dans la population totale. Cela s’explique par le fait que les deux espaces les plus touchés par la sous-densité (couronnes rurales des grands pôles et unité urbaine de Paris, qui rassemblent à eux deux plus de la moitié de la population résidant en zone sous-dense) sont des espaces dans lesquels les 70 ans ou plus sont relativement moins présents. Les personnes âgées de 70 ans ou plus habitent, au contraire, relativement plus souvent dans les pôles urbains (hors Paris), quelle que soit leur taille, qui sont peu touchés par la sous-densité.
Malgré une démographie médicale très dynamique dans les années 1970, les inégalités territoriales de répartition des médecins n’ont baissé que très lentement : ainsi, entre 1974 et 1983, la variabilité de densité entre départements a baissé de 30 % pour l’ensemble des libéraux, alors que leur effectif a augmenté deux fois plus. Actuellement, la démographie médicale est beaucoup moins favorable, et pourtant les inégalités entre départements restent comparables à celles des années 1980. Pour les médecins généralistes, la variabilité des densités départementales est du même ordre de grandeur en 2016 qu’en 1983 (16 % à 18 % en 2016, contre 20 % en 1983) et le nombre de communes où est installé au moins un médecin généraliste est passé de 8 843 en 1981 à 9 595 en 2016.
En 2016, 98 % de la population accède à un médecin généraliste en moins de 10 minutes ; moins de 0,1 % de la population, soit 52 000 personnes environ, doit parcourir un trajet de 20 minutes ou plus en voiture pour consulter un généraliste. La distribution des temps d’accès au médecin généraliste est aussi similaire à celle observée pour les principaux services de la vie courante (Barbier et al, 2016).
Fin 2015, les Français ont en grande majorité une opinion très favorable de leurs médecins : plus de huit personnes sur dix sont satisfaites de la qualité des soins offerts par les médecins généralistes (88 %) [Castell et Denneault, 2017]. Il en est de même pour le niveau d’information donné par leur généraliste sur leur état de santé (87 %) et pour le temps qu’il leur accorde lorsqu’ils vont le voir (84 %).
Les Français sont plus critiques vis-à-vis de l’accessibilité aux soins : 29 % pensent qu’à proximité de chez eux, il n’y a pas assez de médecins généralistes et environ la moitié partagent cette idée à propos des médecins spécialistes (47 %). Plus précisément, d’après eux, ce sont d’abord les ophtalmologues (pour un quart des Français) et ensuite les médecins généralistes (pour 18 %) dont il faudrait favoriser en priorité l’installation près de chez eux. Parmi les 20 % de Français qui déclarent manquer de généralistes et de spécialistes, quatre sur dix souhaitent en priorité l’installation de généralistes.
Le sentiment d’un manque de médecins coïncide relativement bien avec la faible densité de médecins mesurée au niveau communal à l’aide de l’APL. Ainsi, les personnes vivant dans les zones les moins dotées estiment deux fois plus souvent que celles vivant dans les zones les plus dotées que le nombre de généralistes et de spécialistes installés près de chez eux est insuffisant. Par exemple, moins d’un habitant sur cinq au sein
des communes les mieux loties en généralistes juge qu’il y a une insuffisance de généralistes près de chez lui, contre près de deux sur cinq dans les communes les moins dotées.
Maisons de Santé et Pôles de Santé : Trouver une Maison de Santé, un Pôle de santé, une Maison sport Santé en France. L'actualité des maisons et pôles de santé. Le coin des professionnels avec des outils qui facilitent l'installation en Maisons de Santé et une veille sur le marché des maisons de santé.